lundi, mars 06, 2006

Lectures d'hier, pour commencer...

"L'Enigme" de S. Rezvani

Quel mystère cache « l’Ouranos », retrouvé dérivant au large et vide de tout occupant ? La coque du cabin-cruiser est parsemée de griffures, de signes étranges et de traces de sang. A l’intérieur sont disséminés les écrits de ses passagers disparus : les membres de la célèbre famille Knigh.

Tout porte à croire qu’ils sont morts par noyade, après que l’un d’entre eux ait délibérément ôté l’échelle avant de se jeter à l’eau à son tour… Pourquoi et comment ?

Etrange énigme sur laquelle se penchent le « Théseur », le « Poète Criminologiste » et « l’Enquêteur Maritime ». Trois hommes liés à la famille Knigh, ou à sa mystérieuse disparition, d’une manière ou d’une autre.

De carnets en notes, de souvenirs en poèmes, de brouillons en ratures, le Théseur épluche ces écrits laissés en héritage afin d’y trouver le moindre indice. Aidés par ses deux compagnons aussi déterminés que lui à comprendre, il partage avec eux son analyse de la famille Knigh, les souvenirs de ses rencontres avec chacun de ses membres, tous écrivains ou écrivants, leurs paroles parfois prophétiques, les singulières relations les unissant envers et contre tout.

La tension entre les trois hommes est palpable, l’aiguillon de la curiosité constant, jusqu’à ce que l’énigme en elle-même dépasse de loin l’envie de solution. Cette énigme les unit, les réveille et révèle, allume une lumière dans leurs vies pour l’un au bord du gouffre, pour l’autre impersonnelle, ou pour le dernier la rendant plus excitante encore. Mais elle les mène aussi dans les sombres méandres de l’esprit, face à cet étourdissant et effrayant miroir qu’est le choix de la mort…

L’énigme devient L’Enigme.

Elle prend place, s’installe, prétexte aux digressions littéraires et humaines, laissant toutes solutions possibles, plus séduisantes les unes que les autres.

Qui ? Comment ? Pourquoi ?

Quelle est donc la chose la plus enivrante : le savoir ou l’imaginer ?

Ce roman est habilement et subtilement construit, il nous séduit aussi, laisse l’Enigme nous séduire surtout, nous fait aimer la question et non la réponse. Comme cette anecdote souvent rappelée par notre Théseur qui dit que si le Sphynx a épargné Œdipe, ce n’est pas parce qu’il aurait répondu correctement à cette prétendue énigme « Quel est l’animal qui le matin… etc. » variable, mais bien parce qu’il n’aurait PAS répondu, rien, pas un mot. Et donc laissé toute sa force à la question…

Séduisant, déroutant, original et donc… passionnant. Cela, ce n’est pas une énigme.

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