dimanche, novembre 12, 2006

Histoire de mots

Pour J.

Elle est assise, brouillard dans la tête et pluie dans le coeur. Elle voudrait faire ce qu’elle sait faire : une histoire de mots.

Une histoire de mots qui diraient pourquoi soleil, pourquoi jamais, pourquoi ombre, pourquoi demain ou hier.
Mais elle a juste peur de se tromper, de transformer les mots en maux, sans le faire exprès. Elle est maladroite, parfois.

Un jour, elle a croisé les mots d’un autre, par hasard. Des mots, elle en croise souvent, pourtant. Sauf que ces mots-là n’étaient pas vraiment pareils. Alors elle a aimé ces mots, sans s’en rendre compte, simplement. Et puis elle a su que ces mots-là aimaient les siens.

C’est parfois étonnant, les histoires de mots. Ca vous détourne en un tour de phrase.

Mais parce qu’elle savait que les mots, ça pouvait vous mettre les idées à l’envers, jouer l’illusionniste ou vous coller des ailes à la cire, elle a voulu mettre ses mots au soleil. Histoire de voir si les ailes tiendraient ou s’éparpilleraient, cire fondue et illusion aussi.

Mais non. Bien accrochées.

Alors elle est assise et se demande ce qu’elle va bien pouvoir faire de ces ailes-là, dans son histoire de mots. Surtout qu’elle n’a pas le droit de voler.

C’est encombrant les ailes, encore plus quand on est deux à en avoir. Ca prend de la place, on y pense tout le temps, à force de heurter les murs ou de rester bloqué aux portes. Alors pour s’en sortir, on essaie de voir comment elles sont, mais dans le dos, c’est si difficile. On se tourne dans tous les sens, on s’examine, on ne sait pas…
On ne sait pas ce qu’on va bien pouvoir en faire, de ces ailes-là…
Elle ne sait pas.
Pas même si ses ailes la mèneraient loin ou nulle part.
Elle ne sait pas.

Elle sait juste qu’il faudra bien qu’elle arrive à s’en défaire. Même si elles semblent jolies, même si c’est doux, les ailes, elle sait qu’elle ne pourra pas les garder.
Parce que c’est encombrant les ailes, quand on ne peut pas voler.
C’est encombrant les ailes dans une histoire de mots.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Très joli texte, Blue.