jeudi, juin 08, 2006

Pour le fun!

Un texte né de nos ébats en direct sur Vos Ecrits. Ce soir, démarrer d'une dépêche comme contrainte, imaginer l'avant ou l'après. Bref, se laisser aller. Envie de partager la bonne humeur, voici ma contribution...

La dépêche:" Le monopole exclusif de la télécommande aux femmes: c'est l'une des 10 règles du jeu qu'un collectif de femmes saturées de football veulent imposer à leurs maris et compagnons pendant le Mondial-2006 en Allemagne (9 juin-9 juillet)"

Le texte:

Desperate housewife

J’ai tout essayé, vraiment tout essayé. Je lui ai proposé un nouvel abonnement, parabole et bouquet de chaînes à n’en plus finir. Mais il a vu que je n’avais pas coché la chaîne sport 24h/24, a annulé la demande et transformé la parabole en plateau à fruits… Un mois de location DVD gratuit, avec dix chèques cinéma en prime pour son anniversaire. Il l’a offert à son neveu de 13 ans (du coup, je n’ai jamais osé lui avouer que ça comprenait aussi une réduction de 50% sur les films érotiques). J’ai prétendu que la télévision était en panne, et l’ai cachée chez ma tante Julienne, mais elle a appelé chez nous pour réclamer la télécommande... Le jour même, il l’avait récupérée. Les vacances aux Canaries que nous proposent les beaux-parents depuis trois ans, j’étais prête à accepter. Pire, j’ai accepté. J’ai appelé moi-même ma belle-mère qui, sur un ton de femme soumise, stupide et docile m’a répondu : « Oh, Babette, c’est tellement dommage que vous soyez justement libres cette année… Mon Roger a dit qu’il ne se sentait pas très bien et n’avait pas envie de prendre l’avion. Alors comme il y a le football à la télévision, on pourra tout de même organiser un ou deux petits repas ensemble, il aime tellement suivre les matchs avec son fils ! ». D’abord, Babette est le nom de sa femme de ménage, pas le mien. Et s’il y a quelque chose de pire que de regarder le Mondial de football chez soi, c’est de le regarder chez et avec ses beaux-parents.
Après ce coup de fil, je pense avoir ressenti comme une envie de suicide. Par chance, avant de passer à l’acte, cherchant sur Internet une manière poétique, originale et symbolique pour mettre fin à mes jours, je suis tombée sur ce site salvateur… « Non au monopole du Mondial de football sur nos écrans ! Toutes ensemble !» Des tracts, des calicots ! Descendre dans la rue, prôner la justice et l’égalité cathodique des sexes ! Ah, des sœurs m’attendaient, je pourrais donc noyer mon désespoir dans la manifestation sereine et partagée de mon écoeurement face à ces ridicules bonshommes transformés en joueurs de baby-foot sur un écran 16/9.
J’ai envoyé aussitôt un mail, et la réponse n’a pas tardé. Du moins, pour réponse, il y avait juste un compte à rebours : les jours et heures avant d’atteindre l’apocalypse médiatique. Oui, le message était passé… Il ne nous restait plus beaucoup de temps pour agir !
Je me suis inscrite, j’ai noté les coordonnées et, en cachette, me suis rendue à une réunion afin de rencontrer mes sœurs d’infortune. Je dois l’avouer, le premier contact m’a inquiétée. L’endroit était très Tupperware-like. Leur allure aussi.
Mais je me suis laissée gagner par la force de cohésion, par la détermination générale et, surtout, par cet inqualifiable besoin de dépasser notre condition de femme-apporte-moi-une-bière-chérie, de femme-tu-te-rends-pas-compte-il-a-annulé-le-penalty-ce-putain-d’arbitre, de femme-ça-t’ennuie-pas-si-je-ramène-Jean-Pierre-à-la-maison ?. Nous nous étions trouvées : les suffragettes du XXIe siècle…
Le boycott du Mondial en monopole à la télé n’était pas une mince affaire… C’était une œuvre d’ampleur internationale. Mais nous nous sommes mises d’accord : d’abord régler le problème domestique de chacune.
Il nous a fallu pas mal de débriefings. Et puis j’ai décidé que, le 9 Juin…
- Chérie, bon sang, où as-tu mis la télécommande ?
- Ici, mon amour !
J’étais allongée nue dans la chambre lorsqu’il m’a rejointe. Sur mon ventre, un ballon peint autour de mon nombril. J’avais tendu un filet au-dessus du lit et allumé quelques bougies odeur gazons sur la commode. Dans ma main, la télécommande.
- C’est elle ou moi.
Il a souri, surtout du côté droit de son visage. S’est rapproché sournoisement.
- Attention au hors-jeu, mon ami.
- Tu fais aussi arbitre ?
- Trop près.
Son genou était déjà posé sur le lit mais il s’est relevé sans un mot pour ouvrir la fenêtre…
- T’as raison, tu as droit au penalty. Surtout, ne rate pas le tir, le gardien est justement sorti de son secteur…
C’était ce que je voulais entendre. J’ai balancé la télécommande par la fenêtre. 1-0, j’avais passé le premier tour…

1 commentaire:

Valeriane a dit…

Merci pour ce petit moment de lecture!
Très amusant!
Ici, ça va : pas besoin de se disputer la télécommande ;-)