samedi, juin 10, 2006

Marie-Antoinette, quand Sofia nous déçoit un peu...

Un film attendu, certes. J'avais bien hâte de le voir. Hâte d'être surprise, de retrouver ce charme discret, régnant en maître par le don du non-dit, du jeu d'acteur tacite, évocateur et non démonstratif qui m'avait tant plu dans "Lost in Translation". Kirsten Dunst étant une actrice que j'apprécie, oui, j'attendais "quelque chose". De ce film rock-and-roll queen, de cet échappatoire sensuel et coloré. Me reste pourtant un chagrinant goût de trop peu. Les acteurs sont touchants, le contraste musical est plaisant, le film, essentiellement visuel, n'a rien à se reprocher d'un point de vue mise en scène mais...
Mais quelle était donc l'intention de Sofia Coppola? Traduire l'Histoire dans une version humaine, personnelle de Marie-Antoinette? Oui, le message passe. La jeune princesse est mariée à moins de quinze ans, à un dauphin fade et désintéressé, propulsée dans un milieu fait de traditions si pointilleuses qu'elle ne peut s'empêcher d'en souffrir du ridicule. De cette rigidité morale, elle ne peut trouver rien d'autre qu'une forme de prison. Maladroit, naïf et anxieux, le futur roi de France mettra des lustres avant d'honorer sa femme. Malgré tout, une union tendre se crée, aspect subtil et touchant d'une relation qui semble à la fois si attachée et détachée du réel.
Enfermée dans une vie superficielle, Marie-Antoinette apprend l'art du plaisir et de l'exaltation, se crée un monde en dehors du monde, où elle évoluera en jeune femme gourmande et frivole, en maîtresse comblée, en mère aimante. En dehors du monde, tant et si bien qu'elle en oublie que ses dépenses naïves, son insouciance affament le peuple en crise.
Le contexte politique du film est à peine esquissé, et Sofia Coppola n'ira pas jusque à cette fin dramatique de monarques guillotinés. Elle s'arrêtera dignement au départ de Versailles, dans une scène sobre et, selon moi, brillante.
Donc, oui, si l'envie de Sofia Coppola était de quitter les sentiers battus, elle y est parvenue. Point de fresque historique à la bande son lyrique et extravagante. Non, un bel anachronisme qui est tout de même une réussite.
Ce que je lui reproche? Peut-être cette lassitude qui s'installe inévitablement au fil des deux heures de film. Un manque de force dramatique, peut-être? Si le tacite peut extrêmement bien fonctionner, il faut parfois laisser place à un peu plus d'expansion. Rien à reprocher aux acteurs. Mais se défaire de cette sensation d'"elle aurait pu (aller un peu plus loin?)" qui me reste. Combler ce manque...
Mon imagination a peut-être trop fonctionné avant, trop d'attentes, et donc déception légère mais inévitable? Mitigée, donc, mais Sofia Coppola reste pour moi une excellente réalisatrice.

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